No. 65/4    décembre 2012

Grand Théâtre de Genève: ‘JJR'

Par Claudio Poloni

JJR de Philippe Fénelon, Grand Théâtre de Genève

‘JJR' âgé: Rodolphe Briand   © GTG / Carole Parodi

 

Genève, qui l'avait jadis mis au ban et avait brûlé certains de ses écrits sur la place publique, se devait de rendre hommage à Jean-Jacques Rousseau, l'un de ses plus illustres enfants. C'est chose faite en cette année du tricentenaire de la naissance du philosophe, qui a donné lieu à toute une série de manifestations, réunies sous le titre «2012 Rousseau pour tous». Parmi 120 propositions reçues par les autorités, ce ne sont pas moins de 31 projets qui ont ainsi vu le jour. Point d'orgue de ces festivités: la création mondiale, en septembre, au Bâtiment des Forces Motrices (BFM), d'un opéra sur l'oeuvre et la vie de Rousseau, commande conjointe de la ville et du Grand Théâtre: «JJR, Citoyen de Genève». Si les attentes ont été immenses, le résultat s'est révélé plutôt décevant; preuve peut-être que le grand Jean-Jacques ne se laisse pas facilement appréhender!

Pour donner un lustre particulier à cette création, la Ville de Genève et le Grand Théâtre ont fait appel à trois artistes de renom: le compositeur Philippe Fénelon, le librettiste Ian Burton et le metteur en scène Robert Carsen (voir encadré, page 6). La genèse de l'oeuvre n'est pas banale: chronologiquement, JJR, Citoyen de Genève est d'abord confié à Robert Carsen -- signe que le Grand Théâtre voulait à tout prix faire revenir le célèbre metteur en scène canadien qui, on s'en souvient, avait signé quelques-uns des spectacles les plus marquants de l'ère Hugues Gall. Robert Carsen s'est ensuite tourné vers vers Ian Burton, son fidèle dramaturge, pour lui demander d'écrire un livret d'opéra sur Jean-Jacques Rousseau. Comme il l'a déclaré à plusieurs reprises, le librettiste n'a pas voulu présenter une oeuvre retraçant (dans l'ordre chronologique) les grandes étapes de la vie de Rousseau, dans la lignée des Confessions -- une narration linéaire ne lui semblant guère appropriée pour un opéra.

 

Le livret

Inspiré par la structure du célèbre intermède de Rousseau Le Devin du Village (1752), Ian Burton a donc conçu un ouvrage en un acte et sept scènes centrées sur des thèmes essentiels de la vie et de l'oeuvre de Rousseau: la nature, Dieu, le plaisir du texte, l'enfance et l'éducation, la botanique, le sexe et la sensibilité, l'argent. Après ces sujets sérieux, JJR se termine dans l'esprit du XVIIIe siècle par un vaudeville intégrant Le Devin du village et des extraits du Dictionnaire de la musique (1767), avec son système personnel de notation musicale chiffrée. Ian Burton a décidé aussi de faire intervenir dans son livret Jean-Jacques Rousseau à trois âges marquants de son existence: l'enfant de 12 ans, le jeune homme de 21 ans et le vieillard à la fin de sa vie. Tout au long de l'opéra, Rousseau interagit avec d'illustres contemporains (Sade, Voltaire, Diderot), des icônes culturelles de son temps (Robinson Crusoé, un castrat italien), ses propres créatures (Julie, le Vicaire savoyard et les héros du Devin du village, Colin et Colette) ou encore les femmes de sa vie: Madame de Warens, Thérèse, et la voix de sa mère, morte en lui donnant le jour...

 

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RMSR décembre 2012

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(page mise à jour le 16 décembre 2012)