No. 64/4    décembre 2011

 

Variations sur un thème oriental

'Piano Chinois' d'Etienne Barilier

par Alain Corbellari

Etienne Barilier: Piano chinois

Etienne Barilier: Piano chinois: duel autour d'un récital, Carouge, Zoé, 2011, 132 p.

 

Etienne Barilier n'est pas seulement l'un des meilleurs écrivains romands, il est aussi l'un de nos plus fins musicologues. Non content de jouer un rôle souvent essentiel dans ses récits (à commencer par celui qui s'appelle? Musique, publié en 1988), l'art des sons a aussi inspiré l'écriture d'essais aussi marquants que son Alban Berg (1978) et son B-A-C-H Histoire d'un nom dans la musique (1997). Avec Piano chinois, sorti en avril 2011, Barilier parvient, en à peine 130 pages, à réaliser la gageure d'écrire un livre qui est à la fois pleinement un roman bref et enlevé (Gide eût peut-être dit une «sotie») et une réflexion profonde sur les rapports entre musique, subjectivité et géographie. Le miracle est qu'au lieu de se contrecarrer l'un l'autre les deux genres normalement antinomiques de l'essai et du récit fusionnent ici dans la plus heureuse des symbioses. La forme, par ailleurs, est originale, puisqu'elle adapte à la technologie moderne les vénérables procédés du roman épistolaire: deux critiques musicaux s'y affrontent en effet à coup tout d'abord de chroniques sur leurs blogs respectifs puis, le duel devenant plus personnel, de messages mails. Il n'est évidemment pas indifférent que les deux critiques appartiennent à deux générations différentes et que l'enjeu de leur querelle, apparemment objective, mais vite compliquée de sous-entendus sentimentaux, soit une jeune et prometteuse pianiste chinoise. Ce schéma triangulaire, récurrent chez Barilier, permet de faire évoluer les points de vue des interlocuteurs sans que ne se dégage une vérité ultime; la forme essentiellement «problématique» du roman est ainsi respectée, en même temps que l'argumentation, à la fois riche et serrée, y gagne en fluidité...

 

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RMSR décembre 2011

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(page mise à jour le 22 décembre 2011)