Lausanne
Le 'Festival Quatre saisons'
Depuis huit ans, un festival lausannois témoigne du haut niveau de la relève musicale suisse et donne la possibilité à de très jeunes talents prometteurs de se produire devant un public diversifié.
Né dans une famille de musiciens, ayant commencé très tôt l'étude du violoncelle, Oleg Gafner lance en 2014 l'idée d'une série de moments musicaux organisés par des jeunes, destinés à offrir à des musiciennes et musiciens de leur âge l'opportunité de se produire en public -- entre les auditions de conservatoire et les grands concerts, il manque en effet souvent une plateforme pour les jeunes talents. Alors âgé de treize ans, et avec le soutien de la Municipalité de Lausanne, le juvénile directeur artistique et administratif concrétise ce projet en créant le «Festival Quatre saisons». Epaulé par une équipe de bénévoles, d'une vingtaine d'années en moyenne, et par une association, il entend aussi œuvrer à casser les préjugés et prouver que la musique classique n'est ni réservée à une classe sociale particulière, ni comprise uniquement par des connaisseurs ou des personnes âgées. Pour démontrer qu'elle est accessible à tous, et afin que le coût ne soit pas un obstacle, l'entrée est gratuite (collecte libre à la sortie). L'engagement solidaire et généreux du vingtenaire, attesté en outre par son intense activité politique (il est entre autres co-président des Jeunes Verts de Suisse), se retrouve dans les intermèdes musicaux organisés par le festival au moment de la deuxième vague de Covid-19 et donnés en décembre 2020 dans vingt-quatre EMS vaudois, ou lors d'un récent concert caritatif en faveur de l'Ukraine.
Ainsi, depuis huit ans, un concert de musique classique a lieu chaque saison de l'année, présentant de jeunes musiciens de qualité, solistes ou constitués en ensemble de chambre, de moins de 25 ans -- à ce jour, le benjamin avait neuf ans. D'ici à la fin de l'année, 150 interprètes y auront participé, parmi lesquels un certain nombre ont pu commencer à se faire connaître ou même débuter une carrière. Le rôle de tremplin du Festival Quatre saisons n'est d'ailleurs pas à négliger, et des artistes y ont été repérés par d'autres organisateurs d'événements musicaux. Afin de garantir une cohérence, les musicologues et les étudiants de la Manufacture (Haute Ecole des arts de la scène) associés à cette aventure se distinguent également par leur jeunesse. Quant au public, mixte socialement, il comprend aussi bien des personnes retraitées et des familles que des enfants et adolescents qui, pour certains, découvrent à cette occasion la musique classique, sa diversité et la richesse de ses émotions.
Hébergés d'abord par la Maison de quartier de la Pontaise -- un ancien temple reconverti -- puis, en 2020 et 2021, par le salon du Théâtre Municipal décoré entre 1935 et 1937 par Alice Bailly, les concerts s'implanteront dorénavant à la Salle Paderewski du Casino de Montbenon, avec les avantages d'une jauge doublée et d'une scène plus spacieuse, permettant au festival d'accueillir pour la première fois, le 3 septembre prochain, un orchestre ad hoc d'une quarantaine d'instrumentistes, sous la direction du chef valaisan de 23 ans Gabriel Pernet, par ailleurs talentueux clarinettiste. Alors qu'au début, les interprètes pouvaient librement choisir leur répertoire, un thème annuel sert maintenant de fil rouge, par exemple le romantisme ou la musique au féminin. En 2022, quatre pays, dont la scène musicale foisonnante reste souvent largement méconnue, sont à l'honneur. Après des programmes consacrés cet hiver aux Etats-Unis (où les minimalistes Adams et Reich côtoyaient la compositrice postromantique Amy Beach) et ce printemps au Danemark (de Weyse à Ludvig Nielsen, en passant par le concerto pour clarinette de Carl Nielsen avec accompagnement de piano et de caisse claire), le concert estival du 3 septembre sera dédié aux grands maîtres hongrois (Danses roumaines de Bartók, premier concerto pour piano de Liszt, avec Aurore Grosclaude en soliste, et Danses de Galanta de Kodály) et celui de cet automne, le 29 octobre, aux rythmes et aux sonorités de compositeurs brésiliens tels que Camargo Guarnieri, Nazareth ou Villa-Lobos, ou encore Francisco Braga dont on pourra entendre le trio avec piano.
Laurent Mettraux
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