No. 71/1    mars 2018

 

Sept décennies

en sons et en images

Par Vincent Arlettaz

 

A la voir, pourrait-on deviner que la Revue Musicale de Suisse Romande est une véritable machine de compétition? Alors que d'innombrables titres de la presse suisse et internationale ont disparu corps et bien au cours des dernières décennies, notre vénérable dame, elle, poursuit son chemin et établit de nouveaux records... Etre précaire et souffreteux depuis l'enfance, vouée dès longtemps à disparaître, à plus ou moins brève échéance, elle nous a déjà fait la surprise de résister à plus d'une crise et s'offre même le luxe -- alors que tout change alentour -- de rester fidèle à l'esprit de ses créateurs: rendre plus facile au lecteur l'approche d'un art exigeant, soutenir les efforts de ceux qui, dans notre région surtout, mais aussi beaucoup plus loin, souhaitent apporter à notre monde ce 'petit quelque chose' qui sait le rendre plus beau et... plus vivable!

70 ans

Des crises, il y en a déjà eu trois au moins -- majeures, toutes: la deuxième, dans les années 1970, était globale, consécutive à la grande mutation pétrolière, et a touché tous les secteurs d'activité de notre continent. Les deux autres semblent avoir été liées plutôt à des problèmes internes: ainsi, au début des années 1960, un éditeur malavisé avait échoué à transformer notre vénérable dame (à l'époque, c'était encore une adolescente) en un périodique de luxe, cosmopolite et «glamour»; la troisième et dernière, en 2006, aurait dû se terminer par la mort -- on ne peut être plus définitif -- du titre, hâtivement condamné par un comité de personnalités certes brillantes, mais accrochées à une vision dépassée. Lorsqu'elles furent surmontées, avec un peu de distance, ces périodes d'épreuve se sont révélées pour ce qu'elles étaient dans le fond: des moments de renouvellement, où l'on redécouvre une identité, où l'on retrempe un idéal à la source même de notre inspiration. Début 2007, qui aurait pu espérer réaliser une partie seulement de tout ce qui a suivi? Des centaines d'articles, sur au moins autant d'artistes, et près de trois mille pages sont venues s'ajouter aux quelque 12'000 déjà existantes. Surtout, le changement fut qualitatif, et en profondeur: passage intégral à la quadrichromie, liberté jusqu'alors insoupçonnée pour concevoir et réaliser des projets inattendus, qui nous ont emmenés jusqu'en Australie ou au Japon, qui nous ont permis de remonter jusqu'aux origines de notre art, chez les ducs de Savoie, chez les papes avignonnais du XIVe siècle, voire chez les moines déchanteurs de l'époque romane... Notre lot de crises n'est certainement pas épuisé -- j'y reviendrai encore. Dans l'immédiat, constatons qu'une des clés de la longévité aura été, pour notre titre, de garder l'esprit concentré sur la nécessité incontournable de l'ancrage local. Nous sommes favorisés ici bien sûr, puisque la Romandie fait partie des régions où la musique classique est entourée du plus grand luxe de soins... Malgré notre petite taille en effet, grande est l'envie de participer à célébrer les plus illustres compositeurs de l'histoire! Créateurs, interprètes, orchestres, opéras, choeurs bien sûr, ont été au centre de l'attention de nos contributeurs depuis les origines. En fait, c'est même d'un ensemble musical que tout est parti...

 

Les «Feuilles musicales»

En mars 1948, pour présenter à ses auditeurs une oeuvre alors tout à fait contemporaine et peu familière au public romand (l'oratorio A Child of our Time, de Michael Tippett), le Choeur de Lausanne -- disparu depuis lors -- produit un premier fascicule de huit pages, sous le titre de Feuilles musicales. Trois mois plus tard, suit une deuxième livraison (voir l'illustration ci-dessous), qui porte la mention sans équivoque: «paraît quatre fois par an». Toute l'aventure a été rappelée par les deux articles que nous avons publiés en mars 2007, à l'occasion de notre soixantième anniversaire; le premier, par Olivier Larcade -- notre premier et unique stagiaire! -- couvrait la période des débuts héroïques; le second démarrait avec la crise qui, en 1963, remettait en cause tout ce bel effort, mais non sans introduire le titre définitif. Aujourd'hui, nous ne reviendrons que brièvement sur l'ensemble de cette belle histoire, et insisterons plutôt sur les dix années qui, désormais, viennent s'ajouter à une trajectoire couvrant trois pleines générations!

Au cours des toutes premières années apparaît un personnage qui fut central à maints égards: Pierre Meylan. Professeur d'allemand à l'Ecole de Commerce de Lausanne, musicologue autodidacte, ce remarquable pédagogue fut également un éditeur visionnaire, et c'est lui qui, le premier, formula de manière claire plusieurs grandes lignes de notre travail. Certes, avant lui, son prédécesseur Roger Pizzoglio avait ouvert quelques voies: se faire l'avocat des musiques moins connues, de même que militer pour la reconnaissance de l'art musical (formation incluse), figure parmi les revendications de la toute première heure -- notamment déjà dans l'éditorial même de juin 1948. Meylan devait y ajouter l'ouverture et le goût du pluralisme: ne pas prononcer d'anathème ou d'exclusive -- même lorsque, comme c'était visiblement son cas, l'on ne partage pas le point de vue d'un compositeur ou d'un musicologue...

 

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Revue Musicale de Suisse Romande, mars 2018

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(page mise à jour le 21 avril 2018)