Une autre histoire Par Vincent Arlettaz L'arrivée en Angleterre du castrat Senesino (Francesco Bernardi, 1686-1758), vers 1725.
Il était certainement inévitable que notre périodique consacre un jour une de ses éditions au problème du castrat. Nous n'avions pas prévu toutefois qu'un projet de cette sorte puisse déboucher sur tant d'interrogations: ayant suscité, depuis son avènement au XVIe siècle, tous les fantasmes, cette voix disparue depuis plus d'un siècle est aujourd'hui, paradoxalement, plus présente que jamais, et l'on ne compte plus les concerts et enregistrements puisant dans le répertoire de ces musiciens d'exception. Surtout, les légendes les plus folles circulent sur leur compte; mais si l'on tente de s'en approcher, on constatera rapidement que les certitudes sont bien rares; les idées fausses, au contraire, nombreuses et profondes. Ce n'est pas sans une certaine perplexité que l'on peut ressortir d'une telle enquête. La tendance actuelle, pour des raisons de divers ordres, est sans doute à euphémiser le sort de ces artistes d'une espèce éteinte. Or, la bibliographie semble claire: le destin des castrats n'est qu'en extrême surface une histoire de gloire, d'amour et de fortune; le traumatisme hormonal subi par ces jeunes gens n'agissait pas seulement de manière à conserver à leurs cordes vocales leur taille d'enfant: perturbant profondément les mécanismes de la croissance, il les rendait souvent obèses, et plus souvent encore, difformes. Quant à leurs prouesses amoureuses, dont il est fait état dans mainte biographie romanesque, elles pourraient bien avoir été, dans plus d'un cas, voire en généralité, de simples affabulations. Les souffrances qui ont dû accabler ces êtres sont d'autant plus terribles qu'elles ne sont pour ainsi dire jamais montrées. N'oublions pas ces trajectoires brisées, et souhaitons de toutes nos forces que l'art que nous aimons par-dessus tout ne serve plus jamais de prétexte à un tel mépris de l'humain. Vincent Arlettaz
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(page mise à jour le 3 janvier 2025)