Un trésor du patrimoine jurassien redécouvert
Le Graduel de Bellelay à l'heure de l'informatique
par Alain Corbellari
Très médiatisé, l'événement a drainé, lors du concert de présentation du 14 août dernier, des foules considérables en l'église baroque de Bellelay. Présentée comme le point fort de l'été culturel jurassien, la mise en valeur ultramoderne de l'un des plus beaux graduels du XIIe siècle et la présence pour en interpréter les pièces les plus originales d'un des ensembles de musique médiévale les plus renommés de France a fait rayonner, l'espace d'une semaine, l'ancienne abbaye des Prémontrés bien au delà des frontières de son canton.
Située à peu près à égale distance de Bienne, de Delémont, de Saint-Imier et de Porrentruy, l'abbaye de Bellelay n'a pas toujours été à l'écart des grandes voies de communication. Au Moyen Age, elle fut l'un des carrefours de la vie monastique, ce qui ne saurait nous étonner outre mesure, dans cette pépinière de saints que fut le Jura médiéval (on relira à ce propos avec profit la belle Vie des saints du Jura de Pierre-Olivier Walzer). Etablissement vite florissant des Prémontrés, le monastère a acquis, probablement dès l'époque de sa fondation, c'est-à-dire aux alentours de 1140, un graduel dont le style de notation indique qu'il a été copié aux confins de la France et de la Belgique, dans le nord-est de l'axe rhénan, zone de diffusion de la notation dite messine, qui est l'une des principales variantes de la pratique d'écriture médiévale du chant grégorien, et dont le graduel de Bellelay montre l'un des plus parfaits exemples. Cette origine est déjà en soi riche d'enseignements, car elle prouve que Bellelay ne se situait pas dans l'orbite musicale et spirituelle de la plus proche, et alors fort puissante, abbaye de Saint-Gall, centre de diffusion d'une notation grégorienne que l'on peut presque dire standard à cette époque...
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