No. 56/2    juin 2003

 

Armin Jordan

par Antoine Pecqueur

 

«Me consacrer un portrait? Attendez que je sois mort!» rétorque Armin Jordan au journaliste venu lui annoncer la publication d'un article le concernant. A l'heure où ses engagements l'amènent à diriger les principales formations suisses et françaises, retracer son itinéraire s'avérait une entreprise des plus nécessaires. Et pour éclairer le parcours de ce chef suisse hors normes, nous sommes allés à la rencontre des musiciens qui l'ont fréquenté et qui, pour la plupart d'entre eux, sont toujours à ses côtés. Armin Jordan nous le confie: «Ce que je sais faire, c'est aux autres de le dire».

Armin Jordan naît à Lucerne en 1932, mais n'y restera que onze ans. En 1943, son père décède et la famille émigre à Fribourg. Le parcours d'Armin se jouera désormais sans cesse du fameux Röstigraben, naviguant entre Suisse romande et alémanique. A Fribourg, il forme avec d'autres jeunes musiciens un ensemble instrumental dont il prendra rapidement les rênes. L'orchestre «Pro Musica» le confronte—dans des conditions matérielles plutôt pénibles—au rôle de chef d'orchestre. L'amateurisme de ces débuts aura sans doute contribué à développer chez Armin une certaine humilité, face à la difficulté inhérente à toute exécution musicale.

Après des études au Conservatoire de Fribourg, notre jeune pianiste se perfectionne en direction au Conservatoire de Lausanne. Parallèlement, il suit des cours à l'Université de Fribourg. Et même s'il hésite quelque temps entre la médecine et les lettres, nul doute que cette diversité de formation aura contribué à forger son ouverture d'esprit.

Bienne, Zurich, Bâle

A Genève, Armin fait la rencontre de la pianiste Maroussia Le Marc'hadour, qui le prend avec autorité sous son aile et l'amène à se présenter à des postes de chef de théâtre. Il essuie un échec à Berne, mais obtient la place à Bienne-Soleure. De 1957 à 1968, il y dirige un grand nombre d'opéras, sans oublier les concerts symphoniques d'été. Le métier de chef d'orchestre s'apprend sur le terrain; et à cet égard, l'opéra est sans doute le milieu le plus exigeant, tant les paramètres y sont multiples. Le chef y joue souvent le rôle de médiateur entre chanteurs, metteurs en scène et orchestre. Le répertoire doit de plus être assimilé avec rapidité... Jordan accomplit son travail avec brio et se voit nommé premier chef à l'Opéra de Zurich en 1963. Sa carrière est lancée!

Après avoir dirigé au Théâtre de Saint-Gall, Armin Jordan devient directeur musical du Stadttheater de Bâle. «Armin était tout le contraire de ce qu'on avait auparavant: un Bavarois grossier, parfois méchant, qui avait deux ou trois copains dans l'orchestre», remarque Jean-Claude Forestier, percussionniste à l'Orchestre de Bâle. Armin Jordan est invité dans la cité rhénane par Werner Dügellin, metteur en scène et directeur de l'opéra. «C'était l'âge d'or. Jordan et Dügellin formaient une combinaison magique, inoubliable» se souvient Antonio Nunez, Konzertmeister de l'orchestre. Le théâtre de Bâle programme alors aussi bien les piliers du répertoire que des ouvrages de Hans Werner Henze. La direction de Jordan fait immédiatement l'unanimité. Antonio Nunez souligne qu'«il regardait toujours la scène et donnait les entrées à tous les chanteurs et à tous les musiciens. Avec sa bouche, il mimait le texte. On n'avait pas besoin de souffleur!» ...

 

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